•  

    Il n’y a rien de tel qu’une école maternelle pour situer les enjeux des européennes dont les résultats sont tombés hier soir. Dans ce lieu qui accueille tous les enfants et leur apprend les bases de la vie ensemble, on voit par exemple, lors d’une fête du livre, l’une des animations consister en un panneau affichant un grand poisson dessiné sur lequel chaque enfant vient coller une écaille qu’il a préalablement coloré à sa manière. Ce geste ornemental symbolise tout le travail et l’idée de l’école, de la république.

     

    C’est cela même que détruisent chacun à sa manière les partis politiques qui préparent le terrain du Front National : les uns et les autres, en réduisant les moyens des services publics au profit des privilégiés de la finance, entravent le plein exercice de cette discipline de l’éducation commune des petits enfants à vivre ensemble. Tous parmi ces « politiques » y ont mis du leur pour opposer les enfants entre eux, soit en libérant les inégalités de naissance par la réduction des moyens du comblement de ces différences sociales et culturelles par l’école ; mais aussi en stigmatisant les enfants étrangers, alors même qu’un nouveau né par définition, est un étranger pour sa famille et à plus forte raison pour la société qui l'accueille.

     

    Cette logique se déroule d’année en année, avec un soutien sans faille des médias, qui accordent une place et un crédit inouï au Front National, les prédictions de résultats triomphants se succédant à un rythme effréné, sans aucune distance ni analyse des mécanismes à grande échelle des mystifications diverses du discours xénophobe du FN, comme pour prétendre ainsi avoir confirmation à postériori des prévisions d’une montée électorale à laquelle ces médias ont considérablement contribuée. C’est à se demander si le pacte que la grande bourgeoisie capitaliste européenne passa dans les années trente avec les partis xénophobes, n’a pas déjà été passé dans le but de trouver à nouveau une carte joker à l’incurie des partis classiques, socialiste et de droite, à continuer à tenir les affaires à son profit.  

     

    À ce titre on trouvera presqu’un plaisir à écouter et lire le déni de responsabilité sur lequel s’accorderont les dirigeants du pcf à propos du lien entre attachement au PS et absence d’augmentation de score du Front de gauche en France. Le chercheur et philosophe Stathis Kourélakis, lors de son exposé sur Médiapart le soir des résultats des européennes a particulièrement bien pointé ce que j’ai déjà écrit ici lors de billets précédents, à savoir que le résultat en croissante forte et régulière de Syriza est dû à une totale démarcation d’avec les politiques sociales démocrates en Grèce. Et selon lui le choix inverse a été fait par la direction du PCF qui constitue la force fondatrice et principale du Front de Gauche, le PCF restant pour une grande partie de son appareil de direction et d’élus, attaché à une alliance systématique au premier tour des municipales d’il y a un mois ; le résultat de ce choix qui n’est est pas vraiment un puisqu’il s’agit plutôt d’un calcul intéressé pour des raisons de finance électorale et de pouvoir, est on le voit catastrophique.

     

    Sans rupture effective avec le PS, le discours contre l’austérité du PCF, contaminant dans sa compromission le Front de Gauche tout entier, ressemble comme deux gouttes d’eau, même s’il ne part pas de la même analyse ni du même degré de sincérité, à celui tenu par le Parti socialiste. L’amalgame pour les électeurs est trop difficile à éviter : le PCF a servi de faire valoir de gauche au PS à Paris, alors que le PS à Paris ne cache pas vouloir lui aussi assumer, comme François Hollande et ses ministres et députés, un rôle d’application de l’austérité, en proposant un budget d’ « économies ». Le projet de construction de logements qui a servi de principal argument à Ian Brossat et à la Fédération de Paris du PCF, s’avère proche d’un alibi puisque les moyens des collectivités baissant au plan national, la ville de Paris ne sera pas épargnée et le PCF le sait bien.

     

    Donc il y a bien eu de la part de la direction du PCF, contre le souhait d’une grande partie des militants ( avec dans certaines grandes villes des anecdotes caricaturales), volonté de se placer dès avant le premier tour, donc sans même pouvoir mesurer les poids respectif des composantes de l’éventuelle alliance recherchée, dans une relation de cohabitation avec le PS. Ce PS prônant à tous les postes budgétaires les coupes anti services publics et en organisant littéralement le démontage des droits sociaux de la population, a donc placé le Front de Gauche, par l’entremise du PCF, dans l’impossibilité d’une quelconque lisibilité alternative crédible à gauche. Par conséquent le résultat lamentable du Front de Gauche, malgré le dévouement des militants, est à imputer entièrement au double langage de la direction du PCF, appelant à des luttes sociales contre l’austérité tout en nouant des alliances officielles avec ceux qui l’entreprennent.

     

    Dans ce sens cultivé à un degré hallucinatoire de la casuistique et de la dialectique auquel ils nous ont accoutumé depuis de si longues années, ces dirigeants du PCF, sauront, nous en sommes sûrs, justifier la continuation et la non sanction de ce choix tragique pour l’avenir du Front de Gauche et celui de la gauche en France. S’il est vrai que le PS par sa politique, a fabriqué la montée du FN, l’alliance contraire à ses propres énoncées politiques du PCF avec le PS a précipité le PCF et avec lui le Front de Gauche, dans la déconsidération, faisant de lui un autre adjuvant à la montée en flèche du Front National.

     

    On ne pourra, évidemment, pas l’en féliciter. Mais il n’en continuera pas moins ce chemin suicidaire, puisqu’il existe, au sein du PCF, un vivier de jeunes dirigeants grimpant dans les échelons du pouvoir interne, trop soucieux de se ménager les appuis de la direction en place afin de pouvoir, à leur tour, appliquer cette recette qu’avait si bien perçue le cinéaste allemand Fassbinder dans son film Madame Kürster va au ciel (1975). Il est vrai que Fassbinder avait alors déjà parfaitement perçu le rôle inconséquent des autres formes d’actions militantes, activistes et violentes, pour ne pas pour autant nous entrainer dans d’autres illusions.

     

    Que nous reste-t-il aujourd’hui : entendre les dirigeants des formations politiques de gauche toutes impliquées à divers degré dans la collaboration de classe avec le PS dire qu’il faut à nouveau visiter "au porte à porte" les abstentionnistes relève de l’obscénité. Je ne vois pas à présent de sortie du tunnel politique dans lequel la population française s’enfonce. Je ne vois que Madame Le Pen présidente de la République en 2017, exactement comme je l’avais « prédit » sur ma peinture mis en affiche et placardée dans les centaines de cafés et brasseries de Paris en 2011-2012 (voir ci dessous).

     

    Ce n’est pas là faire preuve de pessimisme. C’est un réalisme qui peut aider à ne plus admettre que certaines fautes politiques soient commises par des instances qui monopolisent le pouvoir pour prolonger leur propre carrière de « permanent », mot qui dit tout de l’absence de dynamisme ainsi mise en pratique.

     

     

     

     

    Petites écailles, grand poisson.

     

    Petites écailles, grand poisson.

     

    Petites écailles, grand poisson.

     

    Petites écailles, grand poisson.

     


    votre commentaire
  • J'ai le plaisir de vous informer de la création d'un nouveau blog portant sur des objets d'un autre temps : http://objetsdunautretemps.eklablog.com 

    Bonne visite. 

     

     

    J. A. 


    votre commentaire
  •  

     

    À voir les professeurs de mathématiques, de technologie, de sciences physiques, participer désormais aux jurys de l’épreuve nationale d’histoire des arts en collège, on peut en déduire qu’aussi compétents soient-ils dans leur discipline, il leur est demandé de se soumettre et  participer à une escroquerie intellectuelle.

    Au prétexte démagogique que l’art est perçu comme « faisant partie de la vie », et bien qu’il existe des dizaines de milliers de diplômés des multiples UFR d’histoire de l’art de France capables d’encadrer intellectuellement une épreuve nationale digne de ce nom au niveau collège (mais qu’il faudrait rétribuer), il est demandé à chaque établissement, dans la plus grande confusion, de bricoler un encadrement avec plus de 85% des membres du jury sans qualification spécifique d’histoire le d’art.

    Que dirions-nous, parents, si nos enfants, passant leur CAP de cuisine, avaient dans leur jury des adultes sans formation, au prétexte que la cuisine étant par nécessité pratiquée par presque tout le monde au quotidien, il doit être possible pour n’importe qui de participer à l’attribution d’un diplôme de gastronomie ?

    À entendre un principal de collège demander publiquement à des professeurs de mathématiques de prévoir de s’impliquer davantage à la préparation de l’épreuve l’année prochaine, on assiste à quelque chose qui dépasse le simple cafouillage, pour dévoiler une entreprise de déconstruction des compétences et des reconnaissances des diplômes acquis par les enseignants, participant ainsi de leur dévalorisation statutaire et salariale. 

    D’ailleurs, à ce régime, pourquoi faudrait-il des écoles, et à quoi servent des écoles ? Puisque des diplômes peuvent être attribués par des personnes non formées dans la discipline ainsi évaluée. Que doivent penser les élèves de 14-15 ans passant l’épreuve, lorsque leur propre fragilité se frotte à celle, bien moins justifiable, de l’institution qui leur fait passer leur « diplôme » ? Est-ce un bizutage de plus pour leur apprendre que tout n’est qu’illusion et mensonge dans la société où on les emmène par la main ? Sauront-ils alors par cette « épreuve », comment se comporter dans la vie, en apprenant ainsi à cacher, comme leurs professeurs, leur absence de compétence pour un poste qui serait plus approprié à quelqu’un de formé mais qu’il faudrait payer à hauteur de cette qualification supplémentaire ?

    Le sentiment de culpabilité qui flotte dans une telle entreprise de mystification envers des jeunes gens et leurs parents, n’a d’égal que celui de chercher à en minimiser la portée, considérant que « ce ne sont là que des très jeunes gens ». Voilà pour le mépris en chaine, qui, partant de la discipline non considérée pour ce qu’elle est, dégringole sur les personnels appelés à faire de manière répétée, des choses contre leur fierté du travail bien fait, puis sur les enfants, pour lesquels, à leur âge, comme on sait, « rien n’a d’importance ». 

    Ce mépris, ne venant que des élites soucieuses pour leur propre progéniture du meilleur de l’écrémage et de l’évitement scolaire, témoigne de l’abaissement dans lequel on entend en haut lieu, enfoncer le reste de la population. Après « du pain et des jeux », l’histoire des arts participe d’une opération de maintien de l’ordre hiérarchique, juxtaposant par fausses réformes interposées sans moyens, écrans de fumée après écrans de fumée. Le « public » est bien, d’ores et déjà, appelé à donner une validation « institutionnelle » pendant les émissions de téléréalité. Pourquoi les diplômes nationaux ne seraient-il pas désormais, en ces temps d’essorage des finances publiques vers les fortunes privées, attribués à moindre coût, par tous les gens qui « like » l’histoire des arts et à qui on ne donne pas trop le choix ?

     


    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires