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Par Joël Auxenfans le 7 Avril 2016 à 14:55
Joël Auxenfans. Palissade d'affichages. 2014-2016.
La ville se regarde par ses murs, ses affiches, comme un musée et ses accrochages de peintures. Penser la ville signifier penser le temps de son développement, de son passé et de son avenir, tout en créant des instants présents de qualité.
Qu’y a-t-il, je vous le demande, de bénéfique à la société de voir ses murs accaparés par la communication de quelques grandes multinationales seules à mêmes de s’offrir une visibilité imméritée, juste achetée et répercutée sur le prix de vente des produits. Ces langages, ces allusions, ces vols purs et simples de formes issues de l’histoire de l’art – on pourrait parler d’un pillage – viennent quotidiennement fracasser la conscience du public pour satisfaire des intérêts privés sans aucun scrupule, ni aucune légitimité autre que celle qu’achète l’argent.
Au lieu de cette prostitution de la ville aux plus offrants des acheteurs d’espaces, on pourrait imaginer que les murs, et en particulier ceux qui entourent temporairement un chantier, puissent devenir un mur de réflexion, de réflexivité de la ville sur elle-même. C’est là que l’art intervient, et le mien en particulier.
Joël Auxenfans. Palissade d'affichages. 2014-2016.
J’ai conçu en 2014, pour un commanditaire à la tête d’un énorme chantier d’infrastructure, un projet de palissades de chantier permettant de programmer dans le temps une succession d’affichages. Plutôt que d’inviter des intervenants les uns après les autres, j’ai pensé embrasser la durée globale du chantier pour envisager un déroulement dans le temps d’une suite d’affiches qui se répondraient les unes les autres.
À la fois petites et grandes, ces affiches, soit en quadrichromie offset, soit en monochromie sérigraphie, reprendraient les mêmes images en changeant la taille mais aussi l’aspect, l’une faisant écho à l’autre. Cette « acoustique visuelle » dans la ville, avec des images qui se parlent et se répondent, instaure une sorte de démocratie des images. Parce qu’elles ne vendent rien d’abord. Et parce qu’elles ne se soumettent pas à un message unilatéral de communicant.
Les images introduisent la peinture dans la ville. Mais pas sous la forme à la mode des tags, transgression assez pauvre, proche d’un marquage de territoire et que tentent de récupérer les institutions politiques. Mais sous la forme de toiles peintes, transformées en affiches imprimées. Ainsi, plutôt qu’un catalogue ou qu’une affiche annonçant une exposition, plutôt qu’un produit dérivé, l’impression permet la production même de l’œuvre.
En introduisant ainsi la peinture dans la ville, l’œuvre introduit du même coup la question de la légitimité de tel ou tel sujet à peindre. Plutôt que l’affirmation d’une subjectivité singulière, celle d’un style d’artiste connu ou non, l’œuvre vient au devant de l’époque qui précéda la nôtre, celle qui portait en germe toute la modernité de laquelle nous sentons aujourd’hui les craquements, les crises et les tragédies, y compris celle, la pire, de la perte du sens et des violences qu’elle entraine.
J’ai donc ciblé la fenêtre de la visionneuse à remonter le temps sur les fameuses années fin cinquante à fin soixante dix, années dans lesquelles figurent tant d’espoirs et de tragédies, tant de conflits et de création, au sein desquelles un ferment puissant remuait le monde, la société, les idées, les valeurs et les pratiques. Années où naquirent des projets de vies différentes, des avancées de droits sociaux et démocratiques, où il semblait que le monde n’irait toujours qu’en mieux, où les jeunes auraient meilleure vie que les anciens.
Joël Auxenfans. Peinture affiche. 2015.
Pour cela j’ai puisé dans des archives, des sites, des catalogues, et transformé en peintures faites de ma main des photographies d’époques qui prenait à travers mon acte, justement, une nouvelle « actualité ». Ce n’était pas toujours des photos célèbres ou emblématiques, parfois elles étaient comme discrètes, juste des indices d’une atmosphère, d’un climat. Et c’était là peut-être que je pouvais y introduire, à travers l’économie de la peinture, une manière d’apparaître qui reposait l’histoire qu’elles racontaient sur un nouveau fonds.
Des artistes célèbres, comme Daniel Buren ou François Morellet ont répondu favorablement à mon réemploi de visuels anciens de leur œuvre. Des fondations ou des association, des archives ont bien voulu jouer le jeu de l’emprunt. C’est ainsi que je remercie la Niki Charity art foundation pour Niki de Saint Phalle, la galerie Patricia Dorfmann pour Michel Journiac, Les mémoires d’Humanité et les archives départementales de Seine Saint-Denis, le musée des Beaux Arts de Dole, le Pavillon de l'Arsenal… cette liste n’est pas exhaustive.
Joël Auxenfans. Peinture affiche. 2015.
Pour moi les affichages donnent une présence à la dois directe et « médiate » : la peinture est montrée ici directement en extérieur, créant une présence hors les murs du musée, mais aussi elle passe par le traitement de l’image imprimée, ce qui en fait une relation différée, à elle-même et au public.
Mai 68, c’était il y bientôt quarante ans. Et aujourd’hui que naissent partout ces mouvements Nuit Debout, par exemple, ou que se répand l’agriculture agro écologique, on a l’impression qu’enfin, le fil qui était rompu depuis les années quatre vingt, s’est renoué. Mais ce n’est là qu’une bien fragile supposition.
En tout cas le projet se développe, en continu, les toiles déroulant des bribes d’un récit subjectif de la modernité, par lequel le traitement pictural s’affiche en tant qu’empreinte de l’intime aux prises avec l’histoire, faisant à la fois œuvre d’art et de politique.
Joël Auxenfans. Palissade d'affichages. 2014-2016.
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Par Joël Auxenfans le 27 Mars 2016 à 21:25
Joël Auxenfans. Peintures affiches Mélenchon 1 (2011) et Mélenchon 2 (2016).
Au moment d’éditer la deuxième affiche Mélenchon, il est intéressant de comparer les deux images.
La première partait d’une base de photo presque noir et blanc en renversant complètement la balance couleur, lui ajoutant dans le fond un bleu cobalt comme les céramiques de Della Robia, un violet dans le nœud de cravate et un imperméable « vert amande » qui avait beaucoup contrarié les inquiets d’un culte de la personnalité stalinien et militaire. C’était difficile de leur faire comprendre que pour moi il s’agissait de couleurs, juste de couleurs. Dans cette première affiche, le format est plus allongé en hauteur, plus austère dans l’expression du visage, le regard un peu inquiet tout en étant confiant, un équilibre assez juste pour représenter, plus que l’homme politique lui-même, l’idée de la clairvoyance et de la prudence politiques.
La deuxième affiche est issue de la couverture du livre de Jean-Luc Mélenchon, « L’ère du peuple ». Ainsi je cours encore moins le risque d’être à côté du contexte. Seulement le teint pâle et la chemise blanche de la couverture du livre sont, dans l’affiche, distordus en passages couleurs se fondant les uns dans les autres, du rouge vif au vert chaud pour le fond, et du jaune au bleu clair pour la chemise. Ces passages donnent clairement un aspect chaleureux et optimiste, comme si c’était là l’image d’un candidat « gagnant ».
Disons que la première affiche représente un personnage de la résistance, une sorte de Jean Moulin d’aujourd’hui, tandis que la deuxième montre une personne rajeunie, presque éternellement jeune, confiante, et apparaissant dans un charisme émanant d’un chromatisme de « printemps politique ».
Il m’a déjà été demandé pour la première affiche si je prenais parti « pour » Mélenchon. Je crois que cela est évident. Mais je voudrais dire que je prends parti ici surtout pour la peinture. Je suis peut-être un soutien de Mélenchon, mais je suis encore plus « fan » de ma peinture…
La deuxième affiche prend le parti d’être encore davantage dans cette idée de supporter, au premier et second degré. En effet, je pense qu’on peut percevoir que le stratagème visuel pour valoriser le personnage est assumé et explicité, comme un moyen de rendre le spectateur à la fois complice et conscient du jeu sémantique auquel il se prête volontairement on non. C’est pourquoi, entre distance et fascination, cette affiche propose ce que Bernard Stiegler appelle un pharmakon (http://pharmakon.fr/wordpress/), quelque chose qui peut-être à la fois le poison et l’antidote contre le poison, ce que l’on voit dans le cinéma ou l’art, lorsqu’ils ne sont pas pure séduction ou captation du spectateur.
Est-ce cela, la politique que j’appelle de mes vœux par les moyens de la peinture: pas de fascination, pas d’illusion, mais un éclairement actif et lucide, présentant à la fois le charme et la vigilance à son égard ? Autant dire que parler de ces affiches en termes de « culte de la personnalité » me semble un contresens. D’autant que l’allusion au culte de la personnalité y est faite avec une possibilité, pour le spectateur, de ne pas « tomber dans le panneau », c'est-à-dire, de se rendre compte de ce mécanisme de séduction comme d'une possibilité qui se dévoile à lui en tant que code et non plus en tant que mode opératoire s'effectuant à son insu. Voilà surtout en quoi je qualifie ce travail de politique.
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Par Joël Auxenfans le 26 Mars 2016 à 17:23
Depuis tout petit, j’ai fait de la politique. Lire, parler, converser, dans ma famille ou hors d’elle, rien n’était étranger à des préoccupations sociales, environnementales, économiques, culturelles, aussi bien pour apprécier un paysage agricole qu’une œuvre d’art, mais aussi se penser solidaires des gens qui subissent l’injustice pour changer le monde en mieux.
Déjà au collège, la documentaliste devait nous réprimander pour bruit en salle de lecture, lorsque je m’y trouvais inévitablement en grande discussion avec mes copains de quatrième tous unanimes contre mes idées critiques et répétant sans cesse les rengaines fatalistes du système en place. C’était épique.
Et ceux qui prêchent que les adolescents ne doivent pas s’occuper de politique, devraient plutôt se demander à partir de quel degré de vieillissement cérébral prématuré une telle idée prend place dans un cerveau d’un petit bourgeois. Et ces braves gens vont aussi sans doute nous parler de Guy Môquet, en faisant mine de croire que ce résistant n’a eu ses idées politiques qu’à ses dix- sept ans sonnés et pas avant, promis juré craché… Et encore était-ce là trop tôt selon eux sans doute, car un jeune doit d’abord penser à son intérêt, sa carrière, ses avantages personnels, le plus tôt possible, et se formater pour les bonnes places.
C’est dans cette « trajectoire engagée » que j’ai très tôt eu l’occasion de rencontrer des responsables soit du MJCF, soit du PCF, ou de syndicats lycéens, étudiants, enseignants, etc. Cherchant la vérité, documenté et sincère, j’ai plusieurs fois alors été approché pour faire partie de groupes dirigeants, « prendre des responsabilités » comme on dit. Si je n’y ai pas répondu, c’est que je tenais à garder la disponibilité pour faire d’autres choses qui me passionnaient dans divers domaines. Cela ne m’empêchait pas de militer, de penser ou d’agir politiquement, mais je gardais les mains libres, le temps libre, et la tête à peu près libre – en tout cas déliée de tout espèce de projet de carrière politique ou de pouvoir politique sur d’autres.
Et j’ai fini par avoir, au gré des rencontres, de multiples souvenirs de gens qui, eux, avaient fait le choix inverse, à savoir prendre des responsabilités au sein d’une organisation, chez les communistes, mais aussi ailleurs. Et qui ont parfois passé leur vie dans ce statut d’engagé professionnel, de cadre, de membre de la direction, ou faisant partie du personnel politique d’une mairie, d’une région. J’ai connu aussi des jeunes, qui ont commencé, petit à petit, leur engagement professionnel en politique et qui pour certains, font leur chemin, petit ou grand …
Je ne viens pas là jeter la pierre à bon compte et trahir par un ressentiment pathétique des efforts et des engagements, souvent courageux, longs, astreignants, etc. Ces gens que j’ai connu ont sans doute cru bien faire et ont voulu bien faire, servir la cause de l’émancipation populaire, et, comme il faut bien aussi vivre, alors pourquoi ne pas en vivre, après tout. Même s’il ne faut certes pas attendre de ces places la fortune économique ! De loin en loin, je les ai revus, aperçus, croisés, tandis que je poursuivais mon chemin, ma vie quoi !
J’ai là aussi eu très tôt une appréhension assez critique de ces postes de pouvoir, non pas des gens, mais plutôt de l’effet qu’avait sur ces gens et sur leur façon d’être, leur place particulière vis-à-vis des autres militants, de simples citoyens, et plus globalement de la vie, leur place de pouvoir, qu’on le veuille ou non.
Je pense que choisir d’accepter ou de prendre ces places ne vient pas de nulle part, et n’est pas non plus sans effet sur la manière de voir ni sur la manière de penser le projet politique, de se penser dans le monde.
J’ai souvent eu, dans des échanges avec ces personnes, une appréciation particulière de leur langage, un peu lourd, rodé, bien huilé, ne voulant (ou ne pouvant ?) pas chercher plus qu’il ne faut, et une manière de raisonner qui ramenait toujours finalement non pas tant à un projet révolutionnaire qu’à une activité s’en réclamant et consolidant, protégeant l’organisation de cette activité avant tout. Je restais presque toujours sur ma faim quant à l’aspect génial ou subversif que j’espérais rencontrer dans la politique émancipatrice et que je ne trouvais certes pas chez ces gens.
Ils étaient dans leurs murs, ils n’étaient pas en recherche. Ils pouvaient voyager, se déplacer, travailler dur, mais en fait il se vivaient propriétaires de cette idée révolutionnaire, la gardaient sous une surveillance jalouse, se méfiant de ce que les autres pourraient en faire à leur façon imprévisible.
Je crois que c’est à ce titre seulement que l’on peut admettre cette idée d’ailleurs souvent émise par des anti révolutionnaires, souvent ceux qui ne proposent que résignation et conformisme ou qui haïssent la révolte contre l’ordre en place, à savoir que s’engager en politique est peut-être un acte de foi quasi religieux. C’est pourtant vrai que la politique dans une organisation apparaît là comme un domaine finalement régi par des règles, et en premier celles de l’intagibilité de ces règles, de leur reconduction en même temps que se renouvèlent les dirigeants.
Un peu comme autrefois la sœur, bien formée et qui avait donné des garanties de fidèlité à l’ordre, choisie pour prendre la suite de la mère supérieure vieillisante du couvent, en avait auparavant assimilé toutes les obligations, les définitions, les catégories pour en assurer l’intangible conduite ultérieure. La reconduction assurée d’un règne bien terrestre.
J’ai vu de jeunes dirigents adopter des poses, se mimétiser avec leur « supérieur », peut-être plus par osmose due aux réunions quotidiennes que par copie intentionnelle au sens strict. Et leur passion politique se muait en quelque chose de très pragmatique, de très fermé et défensif pouvant se résumer ainsi : protéger ou renforcer la Maison avant toute chose, finalité de toute chose, mère de toute précaution. Presque tous les jeunes dirigeants que j’ai connus n’étaient pas géniaux, et, en somme, pas réceptifs à la possibilité d’avoir du génie ou d’ailleurs de seulement avoir envie d’en avoir, voir même se méfiaient de l’idée de celui-ci par dessus tout. Ils préféraient continuer la disposition des choses dans laquelle ils avaient trouvé une place.
Je ne prétends pas être détenteur d’un accès privilégié au génie, loin s’en faut. En général, le temps a su m’apprendre que lorsque je crois tenir le génie, il est aussi possible qu’il m’a déjà quitté. Restons modeste. Je parle ici d’une aspiration au génie, non pour opérer une ségrégation entre ceux qui l’auraient et les autres, les dépourvus, mais pour tendre et faire tendre tout un chacun à cette possibilité qui appartient au cœur de l’humain. Il s’agit ici d’une idée prométéenne du « vol » de la réponse opportune à la situation, ce kairos, ce dieu de l’occasion que l’on saisit par un cheveu.
Si, au lieu de cela, la politique révolutionnaire est, elle aussi en son mode propre, une continuation de la religion – en tant surtout que pouvoir temporel – par d’autres moyens (comme l’exprime très bien Cynthia Fleury dans son dernier opus que je recommande « Les irremplaçables » paru chez NRF Gallimard en 2015), je crois que cela ne m’intéresse pas. Je crois qu’il y a, pour une politique développant vraiment son propre processus émancipateur, à prendre en compte un phénomène beaucoup plus organique et spontané (qui ne veut pas dire tout fou et puéril), plus libre, plus proche de l’art, de l’expression, de l’apprentissage par « chacun de sa propre rhétorique » dont Francis Ponge dit génialement que c’est là « une œuvre de salut public ».
Et effectivement, c’était là immanquablement ce que je ne trouvais pas chez ces gens de responsabilité rencontrés au sein des organisations. Je les voyais là en place, presque parce qu’ils semblaient ne pouvoir en effet occuper une place ailleurs, non pas parce qu’ils en auraient été incapables (capables, à leur manière, il le sont), mais comme personnes craignant par dessus tout la dissonance, ce risque de devoir construire et s’exposer dans la solitude, hors d’équipes au sein desquelles ils préfèrent se sentir baigner, protégés. Ce qu’ils appellent le « collectif », qui peut parfois ressembler à une surveillance réciproque à ne pas déroger du ton adopté par le groupe. Cela donne des points de vues qui peuvent atteindre des sommets de réduction de l’ouverture à l’inteliigence d’une situation.
Commme je ne le trouvais pas – ce génie – je l’ai progressivement cherché ailleurs, dans l’art, où, à part des gens géniaux, on trouve aussi des gens sans génie, d’autres calculateurs, mais il y a ouvertement une valorisation de la notion de génie, ce qui ne semble pas compter dans la logique du pouvoir des appareils. Je ne dis pas que tout est simple, l’art d’un côté, la politique de l’autre, au contraire, les choses peuvent à mon avis se croiser, se chevaucher, tout en restant disctinctes.
Mais si Joseph Beuys, immense artiste conceptuel et à la fois en quelque sorte shamann contemporain, disait dans les années soixante dix, que tout le monde était artiste, ce n’était pas pour dire que chacun ferait désormais de l’aquarelle le dimanche, mais bien que tous les gens devaient (sans oligation) devenir auteurs de leur pensée politique et en même temps esthétique, c’est-à-dire responsables d’un projet imprimé au sein de la société, chacun pour soi et pour l’ensemble.
Et de cela, les gens que je rencontrais étaient situés dans leur engagement tellement loins, qu’à coup sûr, le changement ou la création d’une autre société meilleure ne se trouverait pas de ce côté-là. En tout cas pas tout de suite, et pas clairement, pas avec évidence. Et pourtant, comme il faut bien compter avec des organisations, car on ne fait rien de décisif sans organisation collective (ce qui ne veut pas dire qu’il n’y ait que cela pour transformer les choses), j’ai continué à soutenir, participer, porter à ma façon avec d’autres ces idées et ces ambitions.
Mais je garde un souvenir précis d’une certaine manière de prudence, de sécurité assurée envers soi-même, de langage qui cherche à ne pas inventer au fur et à mesure, mais appliquer plutôt des parades et des techniques pour garder le contrôle du dialogue (si tant est que cela en soit encore un ! ). Un certain roulement de la salive dans la langue pour se complaire dans un discours si sûr de ses présupposés, et surtout si sûr de ne devoir pas offrir de prise à l’imprédictibilité de l’autre, à ce qu’il pourrait avoir comme richesse argumentaire décisive, et au risque de se laisser emporter dans une autre voie que celle, prévisible, elle, du maintient de chacun à sa place et d’abord celle du dirigeant à la sienne, dans SA Maison !
C’est Rainer Werner Fassbinder qui a su parfaitement rendre cette insatisfaction ressentie envers la « structure » politique communiste comparativement à l’aspiration à la justice. Son film « Maman Küsters s'en va au ciel » (1975) http://www.cineclubdecaen.com/realisat/fassbinder/mamankunster.htm nous montre entre autre la lenteur avec laquelle les « permanents » répondent au désir de justice maintenant d’une veuve dont le mari ouvrier s’est suicidé.
Cette critique (la mienne en tout cas) ne met pas en cause les élus dévoués, compétents, épuisés de travail au service des autres, ou des cadres qui s’engagent par désir de bien faire, ni des résultats en terme de batailles ou d’acquis législatifs. Et je parle des communistes parce que la question au moins chez eux se pose, et c’est tout à leur honneur, car chez les gens d’appareil du parti socialiste, des écologistes ou de la droite, l’obsession du carriérisme y est assumée sans état d’âme, franchement, pragmatiquement : on vient dans ces organisations pour prendre des places, clairement et le plus tôt possible. Ce qui est le point commun et consensuel de ces partis.
Mais force est de constater que la notion même de direction politique, même et surtout dans cette gauche qui se dit radicale, porte en elle structurellement un risque de décallage vis-à-vis des mouvements qu’elle cherche à inspirer. Le cas actuel du choix solitaire de la direction du PCF de s’orienter à présent vers la primaire, mode américaine initiée en France par les politiciens socialistes en 2011, est un cas d’école de cette tendance à instaurer des mécanismes institutionnels qui se substituent à la dynamique politique populaire. Comme des précautions et des protocoles méthodologiques qui s’accumulent pour se prémunir de tout risque de débordement ou de surprise avant tout, pour s’empêcher collectivement de créer.
À l’inverse, la proposition de Jean-Luc Mélenchon d’être candidat pour la présidentielle de 2017 me semble appartenir, elle, à l’idée de création de situation, même fragile, mais tirant parti du « Kairos », du sens de l’instant imprévu, de l’invention de données politiques inattendues, qui peuvent peut-être plus facilement engager une dynamique que l’application de règles répétitivies, de précautions, de parades attendues, et finalement lourdes et décalées, voire franchement contreproductives malgré les mots d’ordre « rassembleurs » qui restent à l’état de vœux pieux.
C’est pourquoi, l’énergie libératrice perceptible dans l’initiative de Jean-Luc Mélenchon de lancer un processus hors des partis de l’establishment de la gauche est intéressante, parce que inattendue et pourtant justifiée. Cette « gauche », qui se définit depuis tant d’années et crescendo de manière fluctuante selon des intérêts électoralistes changeants, est devenue, un capital de compromissions répétées et suicidaires avec les mêmes socialistes qui approuvent ou ne désavouent pas avec conséquence les centaines de trahisons successives que le PS a commises depuis si longtemps.
En gros, la direction et l’appareil du pcf ont tendance de plus en plus à confondre prudence et absence de projet, précaution, protection et une ambition politique de changement portée par des énoncés ronflants mais creux. Et en cela ils ressemblent à ces milieux qui se méfient des œuvres d’art, parce qu’elles les entraineraient immanquablement hors de leur confort, de leur volonté de contrôler les développements dans des configurations qu’avant toute chose, ils souhaitent conserver sous contrôle. C’est en des circonstances comme les nôtres, et en dépit des apparences, une démarche incompatible avec l’idée même de progrès et de changement. Et que la société civile, en souffrance de toute part, avide même à son insu de dynamique révolutionnaire et d’émancipation, paie cher !...
Joël Auxenfans. "Mélenchon 2" ou "la bonne nouvelle". Peinture affiche. 74 x 53 cm environ. 2016.
Voir article précédent pour la souscription en cours.
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Par Joël Auxenfans le 13 Mars 2016 à 19:54
Joël Auxenfans. "Mélenchon 2" ou "Bonne nouvelle". Peinture affiche. 2016.
Bonjour,
La moitié du coût d’impression a déjà été rassemblée par de généreux donateurs en moins d’une semaine. Qu’ils soient ici vivement remerciés !!
Je joins le nouveau cliché effectué avec un nouvel appareil photographique. Encore une huitaine de jours et je pense pouvoir commencer l’édition !
Vous pouvez, si cela vous dit, rejoindre les premiers souscripteurs et contribuer ainsi à une action artistique directe.
Recevez mes sincères salutations.
Joël Auxenfans
Appel à souscription:
Bonjour,
Après les succès des affiches Mélenchon 1* et Le français**, acquises par la BDIC Musée d’histoire contemporaine et par des collections privées, voici l’édition de ma dernière peinture affiche, « Mélenchon 2 ».
Cette image d’une campagne d’artiste sera diffusée par mes soins, et ceux des soutiens du candidat.
L’impression de l’affiche coûte de 350 à 430 euros selon le tirage, de 500 à 1000 exemplaires. Je cherche donc, avec votre aide, à atteindre de quoi commencer l’édition. Ceux souhaitant participer à cette « création pour la rue » peuvent m’envoyer leur accord et je leur renverrai un RIB pour un virement.
Merci de votre attention et de votre aide !
Joël Auxenfans
* : https://vimeo.com/122246662
** : https://issuu.com/jesuisparisartauction/docs/_jesuisparisartauction_2016 catalogue p.41
Blog : http://desformespolitiques.eklablog.fr/
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Par Joël Auxenfans le 11 Février 2016 à 14:28
Joël Auxenfans. Bonne nouvelle. Peinture affiche 2016.
Après les succès des affiches Mélenchon 1* et Le français**, acquises par la BDIC Musée d’histoire contemporaine et par des collections privées, voici l’édition de ma dernière peinture affiche, « Mélenchon 2 ».
Cette image d’une campagne d’artiste sera diffusée par mes soins, et ceux des soutiens du candidat.
L’impression de l’affiche coûte de 350 à 430 euros selon le tirage, de 500 à 1000 exemplaires. Je cherche donc, avec votre aide, à atteindre de quoi commencer l’édition. Ceux souhaitant participer à cette « création pour la rue » peuvent m’envoyer leur accord et je leur renverrai un RIB pour un virement.
Merci de votre attention et de votre aide !
Joël Auxenfans
* : https://vimeo.com/122246662
* : https://issuu.com/jesuisparisartauction/docs/_jesuisparisartauction_2016 catalogue p.41
Blog : http://desformespolitiques.eklablog.fr/
et tribune ici :
http://www.lefrontdegauche.fr/tribune-de-joel-auxenfans/
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